L’ancienne vie :
Avant l’arrivée du Fléau sur les terres de Lordaeron, Hearthglen était une paisible petite ville. N’étant pas aussi grande que Lordaeron ni aussi belle que Stratholme, elle possédait néanmoins son charme. Loin des tracas quotidiens des cités importantes, Hearthglen jouissait d’un calme relatif tout en étant retirée dans les collines. Il existait néanmoins de nombreux gardes et parmi la garnison se trouvait un soldat en particulier.
Cet homme était une personne sans histoire. Devenu militaire dès l’âge requis, il fut mis en poste à Hearthglen et n’y avait jamais bougé. Il n’avait pas vécu la guerre contre les Orcs ni aucune bataille d’envergure. Il n’avait pas de famille et peu d’amis. Cette personne solitaire n’avait que trois occupations : la connaissance des herbes, l’art de créer des potions en combinant toutes sortes de plantes et la… gastronomie.
Quelques brigands existaient bien et des vols étaient parfois perpétrés. Mais le bon roi Térénas avait réussi à donner une sécurité certaine sur les terres de l’Alliance. Mais un jour, une jeune femme disparut dans les environs d’Andorhal. Des recherches furent lancées mais n’aboutirent pas. Quelques semaines plus tard, une nouvelle personne s’était mystérieusement volatilisée pendant son trajet entre Andorhal, toujours, et Hearthglen. Une fois de plus, les enquêtes n’aboutirent pas. Quelques Paladins de l’Ordre de la Main d’Argent furent postés sur la route entre les deux villes. Bien que la panique n’était pas palpable, certains habitants n’osaient plus sortir de chez eux. La présence d’Orcs ou de Gobelins était devenue une rumeur de plus en plus persistante. Mais rien y fit, la semaine plus tard, une nouvelle personne disparut au cœur même d’Hearthglen. De nouveaux Paladins arrivèrent et de nouvelles recherches furent lancées. Mais cette fois, ils trouvèrent les restes d’un cadavre à moitié dévoré et dépecé.
Cela faisait un mois que la suspicion et la crainte régnaient sur la paisible ville des collines quand un attroupement de Paladins et de gardes se fit dans une maison proche de l’arrière de la ville. Un mouvement de foule arriva et tous découvrirent que la Main d’Argent avait attrapé le responsable des disparitions. Tous reconnurent ses cheveux mi-longs et son visage. Comment un garde aussi respectable, bien que solitaire, avait-il pu devenir l’horrible monstre terrifiant la ville qu’il était sensé protéger. Avec difficulté, il fut emmené en dehors de la ville. Il fut placer dans le même chariot qui servait, jadis, à emporter les Orcs dans les camps d’internement.
Il supporta les insultes et les jets de pierre, endura les brimades. Il reçut la plus sordide cellule de Stratholme et les preuves allant contre lui, il ne reçut pas de jugement. Un jour, une personne vint lui annoncer sa prochaine pendaison. Ce fut la seule personne qu’il aperçut pendant ses cinq jours d’emprisonnement. Nul ne vint lui donner de quoi se restaurer. Ils le laissaient mourir de faim et de soif. Il entendait les gardes se moquer de lui. Personne n’avait cherché à comprendre cet homme sans histoire et pourquoi il avait commis ces atrocités, personne ne désirait entendre ses raisons.
Au plus profond de lui, il entendait une voix lui disant de tuer et de dévorer ses personnes. Il avait lutté mais il se laissa abandonner après un certain temps. Et il ne regrettait rien. Chaque personne qu’il mangeait lui offrait plus de savoir et plus de puissance qu’auparavant. Il se sentait un autre homme, plus important et plus respectable. Mais il fut capturer et mis en prison et aujourd’hui était le jour de son exécution.
A quelques heures de sa pendaison, il lui fut amener une assiette et un gobelet en terre. Son unique et dernier repas dans les enceintes du joyau de Lordaeron : Stratholme. Mais le repas ne faisait guère honneur à la réputation de la ville. Ainsi il dut se contenter d’un morceau de pain fait du matin avec la fournée la plus récente des grains d’Andorhal. Il mangea ce qu’on lui donna et partit pour son exécution mais n’arriva jamais à la potence. Dans les rues de Stratholme, le Prince Arthas se livrait à une purge insensée. Le condamné réussit à s’enfuir lorsque ses gardiens durent affronter un Seigneur de l’Effroi et sa suite. Il parvint à quitter la cité mais au bout de quelques pas, il s’effondra au sol et tout fut noir autour de lui…
Résurrection :
Un éclair de lucidité jaillit des ténèbres. Il ne savait pas où il se trouvait ni qui il était. Il tomba sur le sol et pendant quelques minutes, il chercha à se rappeler des moindres détails sur son existence. Il se rappela le ciel bleu mais celui-ci était à présent invisible, caché par un épais brouillard à la couleur douteuse. Il se souvint des fraîches rivières mais elles étaient troubles et croupies. Il se remémora les arbres et les plantes, ses anciennes amies, mais les troncs étaient morts et les branches brisées, quant aux herbes, elles paraissaient tourmentées. Il déambula longtemps, bien que le temps ne voulait plus rien dire au fond de lui. Il était perdu dans un lieu inconnu et pourtant si familier. Il avait changé, son corps était devenu décharné et il ressemblait à un cadavre marchant tant bien que mal.
Une heure, un jour, une semaine ou plus se passa et ses pas le guidèrent là où il se sentait appelé. Posée sur un tronc d’arbre mort, une pierre couleur sang, luisante, presque incandescente était là. Instinctivement, il attrapa la pierre dans ses doigts osseux et tout lui revint et… plus encore. En lui monta une colère comme il n’en avait vécu auparavant. Une haine si profonde si viscérale qu’elle semblait le ronger. Plus que tout aussi le désir de vengeance, l’envie de faire payer à tous ceux qui avait entravé sa route et qui le feront dans l’avenir. Il serra la pierre encore plus et la planta profondément au centre de son torse décharné. Une lumière rouge sang émana de la précieuse gemme, plus intense qu’elle ne l’avait jamais été, promesse indirecte à une soif bientôt étanchée.
Et une voix familière, qu’il n’avait pas entendu depuis si longtemps, depuis Heartglen, résonna dans sa tête :
« Ki ijkhe ak quemish »
Cette langue qu’il ne connaissait pas lui parla comme s’il s’agissait de son parlé natal. Relevant ses orbites vides vers le ciel, il hurla dans la campagne :
« Oui, je serai ta vengeance ! »
Le temps n’est plus à l’oisiveté, le temps est à la Vengeance…
Mar 22 Mai - 16:07